Désir
Elles ont gloussée. Elle ont caqueté et gloussé. Elles lui ont donné des coups de coude. Elles faisaient, vas-y on t'encourage, on est tes amies, saisis ta chance. Mais c'était faux, elles étaient jalouses. Secrètement, elles espéraient toutes la tuer d'un coup dans le ventre. Elle, elle était belle, elle était brune, elle avait deux avantages sur les autres. Mais là où elles se trompaient, c'est qu'elle ne les écoutait pas, elle ne faisait même pas attention, plus rien n'existait, plus de court de lycée, plus de cours au lycée, plus de lycéen, plus qu'elle et moi. Elle a dit:
-Amandine. Et toi Ado... et toi , tu t'appelles comment?
Elle me connaissait plus elle que moi sur ma vie. Mon nom, elle l'avait appris par coeur dès la rentrée. Elle croyait peut être qu'elle était discrète, elle, et ces oies qui avaient l'habitude de s'asseoir dans ce coin de la cour, pour me mater, moi, en face, fumant.
-Amandine, viens, éloignons-nous de cette basse cour, suis moi!
Elle a rien dit. Elle a suivis. On est allés à côté de la murette, derrière les sapinettes. Là où seulement les mégots poussent. Elle a toujours rien dit. Elle se dit qu'elle rêvait, qu'il fallait pas qu'elle bouge, qu'elle allait se réveiller. J'ai dit:
-Tu sais... d'ici, je te voyais souvent avec tes copines, pour moi, tu ne représentais rien, tu n'étais qu'un vague nuage de fumée informe.
Elle avait le sens de la réplique. Elle a dit:
-Ha?
-Des années vois-tu on garde ses petites habitudes, j'étais là, je fumais ma clope en égoïste, comme si rien au monde n'existait, dans mon coin, seul.
-Tu sais, je t'ai déjà remarqué ici. Heuu. Parce-que tu...
Je mets mon doigt sur ses lèvres.
-Non, n'en dis pas plus! Y a des jours, dans ta vie, tu sens un manque. Je sais pas si ça t'est déjà arrivé. Moi, je l'ai ressenti, lundi, alors que j’étais toujours là, seul, con, abandonné. Et puis, j'ai ressenti ce besoin. Mon cerveau criait famine, comme une carence, comme une absence subite. Puis mes poumons, ma trachée, ma gorge, chaque vaisseau sanguin, chaque muscle, chaque cellule de mon coeur,de mon corps se sont révoltés contre ce besoin si oppressant, si redouté depuis des années. Mes lèvres. Surtout mes lèvres.
J'avais toujours mon doigt sur sa bouche. J'ai caressé lentement. Elle a dit:
-Glup!
-Oui, je sais. C'est dingue, en cours, on étudie, on démontre, on fait des signaux logarithmiques. On le prouve: la bouche n'est qu'un empilement de nerfs, du bête courant éclectique. Mais alors, comment expliquer une telle décharge d'adrénaline, un tel plaisir à ce simple contact si désiré?
J'ai plaqué ma main sur sa cuisse. Ça l'a un peu réveillée.
-Et puis subitement aujourd'hui, j'ai compris. Seule toi pouvais m'offrir ce dont j'avais tant besoin. Je veux qu'on partage tout ensemble. Je veux respirer le même air que toi, je veux qu'on soit unis dans le pire.
J'ai monté ma main. Ses jambes dégoulinaient entre mes doigts. Dans ses yeux elle me faisait l'amour:
- Adonis, je ...
- Je peux?
-Ouiiiiiiiii
J'ai mis ma main dans sa poche. J'ai pris le paquet de clopes. J'ai dit:
-Ouais, merci, ça fait deux jours que j'ai plus de sous pour m'acheter des clopes, ça commençait à me rendre nerveux.
-Amandine. Et toi Ado... et toi , tu t'appelles comment?
Elle me connaissait plus elle que moi sur ma vie. Mon nom, elle l'avait appris par coeur dès la rentrée. Elle croyait peut être qu'elle était discrète, elle, et ces oies qui avaient l'habitude de s'asseoir dans ce coin de la cour, pour me mater, moi, en face, fumant.
-Amandine, viens, éloignons-nous de cette basse cour, suis moi!
Elle a rien dit. Elle a suivis. On est allés à côté de la murette, derrière les sapinettes. Là où seulement les mégots poussent. Elle a toujours rien dit. Elle se dit qu'elle rêvait, qu'il fallait pas qu'elle bouge, qu'elle allait se réveiller. J'ai dit:
-Tu sais... d'ici, je te voyais souvent avec tes copines, pour moi, tu ne représentais rien, tu n'étais qu'un vague nuage de fumée informe.
Elle avait le sens de la réplique. Elle a dit:
-Ha?
-Des années vois-tu on garde ses petites habitudes, j'étais là, je fumais ma clope en égoïste, comme si rien au monde n'existait, dans mon coin, seul.
-Tu sais, je t'ai déjà remarqué ici. Heuu. Parce-que tu...
Je mets mon doigt sur ses lèvres.
-Non, n'en dis pas plus! Y a des jours, dans ta vie, tu sens un manque. Je sais pas si ça t'est déjà arrivé. Moi, je l'ai ressenti, lundi, alors que j’étais toujours là, seul, con, abandonné. Et puis, j'ai ressenti ce besoin. Mon cerveau criait famine, comme une carence, comme une absence subite. Puis mes poumons, ma trachée, ma gorge, chaque vaisseau sanguin, chaque muscle, chaque cellule de mon coeur,de mon corps se sont révoltés contre ce besoin si oppressant, si redouté depuis des années. Mes lèvres. Surtout mes lèvres.
J'avais toujours mon doigt sur sa bouche. J'ai caressé lentement. Elle a dit:
-Glup!
-Oui, je sais. C'est dingue, en cours, on étudie, on démontre, on fait des signaux logarithmiques. On le prouve: la bouche n'est qu'un empilement de nerfs, du bête courant éclectique. Mais alors, comment expliquer une telle décharge d'adrénaline, un tel plaisir à ce simple contact si désiré?
J'ai plaqué ma main sur sa cuisse. Ça l'a un peu réveillée.
-Et puis subitement aujourd'hui, j'ai compris. Seule toi pouvais m'offrir ce dont j'avais tant besoin. Je veux qu'on partage tout ensemble. Je veux respirer le même air que toi, je veux qu'on soit unis dans le pire.
J'ai monté ma main. Ses jambes dégoulinaient entre mes doigts. Dans ses yeux elle me faisait l'amour:
- Adonis, je ...
- Je peux?
-Ouiiiiiiiii
J'ai mis ma main dans sa poche. J'ai pris le paquet de clopes. J'ai dit:
-Ouais, merci, ça fait deux jours que j'ai plus de sous pour m'acheter des clopes, ça commençait à me rendre nerveux.