Attentat

Publié le par Adonis

    Une petit fille sur la pointe des pieds écrivait  sur le mur de briques  rouges  "Petit Beurre Lu : depuis 1846". J'enlève le couvercle. Je regarde à l'intérieur. Un vieux briquet cramé, un sachet de vis, un flacon d'huile pour chaîne, deux ou trois trucs non identifiés , une clef anglaise. Je le prends. Je ferme le couvercle, la porte s'ouvre. Je vais vers le vélo.
    -T' aurais pas trouvé mes clefs quelque part ?
    Je me suis agenouillé. J'essaie de comprendre l'esprit tordu de l'ingénieur du vélo. Je trouve les freins. Ou plutôt, le système inhabituel de boulons qui permet de le fixer. Je mets  ma clé anglaise.
    -Hé, p'tit frère, je crois que je te parle !
    P'tit frère, c'est  pas affectueux, c'est juste condescendant.
    -Nan, je te faxe dès que je les retrouve.
     Je commence à tourner. Complètement dans le vide. J'ai  même pas regardé la taille de la clef.
    -Qu'est tu fous ? tu serres les freins de ton vélo?
    -Nan, je les desserre !
    -Pfff... t'es con, on peut  pas avoir des convers aimables  avec toi!
    -Si tu veux être aimable, tu pourrais me chercher une clef de huit !
    -Nan, j'crois pas.
    -S'il te plaît !
    -Non, c'est pas ça, mais en fait ,je...
    -Bon, ça dans ma main, c'est une clef anglaise, et le chiffre-là,  c'est sa taille.
    -Ah ok
    Elle va au fond du garage, elle cherche. Je suis toujours sur le vélo, je cherche le frein arrière, son fonctionnement. J'entends un cri dans le jardin.
    -Meurs  chacal !
    Puis une déflagration. Puis une odeur de poudre. Je demande :
    -Ils me cassent les oreilles ces deux là avec leurs pétards. C'est quand que Florian se barre de chez nous?
    -Bah, ça  va, ils sont gentils.
    Je trouve le frein arrière.
    -Parle pour toi. Ca  me suffisait d'avoir un frère casse-couille. Maintenant Horestre et Florian me font chier depuis trois jours. Hier je me suis réveillé avec un de leurs pétards sous mon lit. Ils ont foutu tout le tube d'Harissa dans mon Nutella et ce matin ils ont même cherché à se battre contre moi. Évidement, à 12 ans, ils ont pas  tenu longtemps. Vivement qu'il se casse!
-Ha, mais t'es  pas au courant ?
-De quoi?
    Elle revient, elle tient la clé de huit dans la main.
    -T'as raison de serrer, un accident est si vite arrivé!
    Elle se frotte frénétiquement l'épaule gauche. Seule une petite ruelle donne accès à ma maison. Au bout d'une cinquantaine de mètres d'une petite  pente, la route fait un angle droit serré pour donner sur une avenue. Mon petit frère, ma soeur, même mon père eurent déjà un accident ici. Avec l'habitude, on prend toujours le tournant à 15-20 km/h. Mais si un jour, les freins ont la moindre petite déficience, on se prend nécessairement le mur en pleine face. Heureusement, à une telle vitesse, l'accident grave est totalement impossible, au pire risque-t-on quelques  jours d'hospitalisation pour fracture. C'était arrivé à mon frère, le fémur, mon père, la main gauche, et à ma soeur, son épaule. C'est une sorte de tradition familiale.
    -Je  suis pas au courant de quoi?
    -Tiens  ta clef.
    Je me rallonge. Je réessaie  de tourner le boulon.
    -Pas bon non plus, y en a pas de plus petit?
    -Tu vois comment c'est le bordel, papa range rien !
    -Tu veux pas me chercher le flacon d'huile dans la boite de P'tit Lu alors?
    Elle veut. Elle y va. Elle parle un peux plus fort, c'est derrière le mur.
    -Je croyais que papa maman te l'avaient  dit!
   -Nan, tu sais bien qu'ils me disent jamais rien!
    Elle me ramène la bouteille. Je suis content, elle a  pas vu qu'elle s'était fait une tache d'huile sur le pantalon !   
    -Bon, t'accouche?
    Je commence à mettre de l'huile. Elle chuchote:
    -Il ne connaît pas son père. Sa mère est à l'hôpital, elle dort à coté de son grand frère, il a une leucémie, il va faire 20 ans dans deux semaines . Ils ne savent pas s' il  sera encore là pour le fêter.
    -Bah... ça permettra à Florian de s'économiser un cadeau !
    -T'es.. t'es ... t'es vraiment horrible, je ne reste pas une seconde de plus avec toi!
    -Tu pourrais m'envoyer le chiffon en sortant!
    Elle sort à grandes enjambés . Elle s'arrête à la porte. Elle prend le chiffon, elle me le balance le plus fort qu'elle peut dans la gueule. Elle crie:
    -J'espère que tu te vautreras en vélo en sortant !
    Elle claque violemment la porte. Je prends  le chiffon. Je frotte longuement .J'enlève toute l'huile que j'ai mis dans les freins du vélo de Florian.
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Commenter cet article
L
le monstre humain c'est beau
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A
sur cette histoire bonne soiree .. bisous
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A
Soirée... soirée... vite dit ça, t'as posté a 6h30 ;) bisous bien baveux quand meme !