Gigolo

Publié le par Adonis

    -Je veux pas faire le gigolo
    -Écoute, adonis... calme toi...
    Et merde, j'ai que 16 ans 3 mois 9 jours. Je suis trop jeune. J'ai appris d'où venaient  les bébés  y a même pas 6 ans. Grâce à une pile de vieux magazine oublié dans le grenier. Et je dois faire le gigolo. Mon père m'a filé ma première capote y à peine deux ans, seule fois de ma vie ou il m'a  parlé  de cul. Et je dois faire le gigolo. Mon père. Ma mère. Ma famille. Mes voisins. Je ne pourrai jamais supporter leur regard. Je ne pourrai pas supporter cette honte.
    Mes amis. Et puis chiottes, je m'en fous, ils  penseront ce qu'ils veulent de moi. Mais moi, je pourrai  pas supporter. De pire en pire chaque année. Il y avait une époque, j'étais un mignon petit garçon. Puis plusieurs Noël ont passé. Je n'étais plus petit. Puis plusieurs rentrées ont passé. Je ne suis plus un garçon. Je suis un "mec". Salope.
    Je ne suis plus que le morceau de porc qualité supérieur de l'Hyperviande. On me regarde, on salive, on essaie de me toucher, les mégères voudraient toutes sortir avec moi, du magasin. Et maintenant, juste pour mon corps, juste pour un pitoyable tas de chaire et de peaux, on veut m'obliger à faire le putain.
    -Adonis, s'il te plaît, je t'en prie,  tu acceptes?
    -Jamais

    Mon mac me surveillait. Il était assis derrière la plante en plastique. Il se limait les ongles. Ou plutôt essayait-il de le faire croire, il ne lui restait plus que de la peau. J'espérais que ce soit la vieille, la moche, qui me demande le tarif. Deux femmes tournaient autour de moi, dans un petit espace restreint de 15 mètres de larges et 10 de long. La veille, ça aurait brisé la monotonie. Mais le chef caché dans l'ombre savait tout, le chef surveillait tout, le chef contrôlait tout.
    Ce fut la jeune, la bonne. De près, on voit sa perruque, de près, on voit que son maquillage ne lui est pas habituel. De près , ça fait toc. Elle a peine 18 ans. Elle essaie de faire croire qu'elle est plus vieille. Elle a essayé de me faire croire qu'elle avait dans les 25 ans, et moi je lui faisait  croire que j'en avais  une vingtaine. Moi aussi je suis maquillé.
    -Beau gosse, tu rêves. Et moi, tu me fais rêver pour combien?

    -Tu sais bien qu'on_est pas très riche.
    Et voila Cedric tentant les sentiments. Le chef qui joue sa Cosette . Mais pas à moi. C'est un pro  de la manipulation. Il s'est fait passer pour tellement de personnes. Il a trompé  tellement de gens.
    -Si tu le fait pas, Cedric n'aura plus assez d'argent pour s'occuper de nous, il sera obligé de chercher un autre travail !
    Pas toi. Pas toi Dolores. Tu le connaît  aussi bien que moi. Dolores, je t'en pris.
    Cédric surenchérit :
    - Maintenant tu es le seul à pouvoir le faire, tu es le plus... enfin je veux dire, tu es le seul à être  assez...
    -...crédible pour être gigolo. Et puis c'est toi le plus proche physiquement de Vincent!
     Beau? C'était ça le mot? Ce con de Vincent. La semaine dernière, il avait cassé  sa tirelire cochon. Avec le liquide, il est allé se bourrer la gueule. Dans un bar glauque. C'est bien des idées à lui. Bagarre. Rien de grave, mais 3 mois d'hosto. Et moi, je devais le remplacer pour sauver toute la troupe?
    -Adonis, ça fait des années que tu joues un petit rôle  insignifiant. Mais tu as grandi. De toute façon, ça allait t'arriver. Tu devras travailler dur. Tu devras être forcement en contact avec des centaines d'inconnus. Ils vont te juger sur une soirée. Ils paieront pour ça. Mais toi, tu leur en donneras pour leur argent, le meilleur de toi. Tu devras leur donner envie de revenir. Et tu verras, toi aussi tu aimeras. Tu en deviendras accro. Et ça sera toi qui ne pourra  rapidement plus t'en passer.
    -Je... je suis trop timide.
    -Adonis, regarde moi. Fais le pour nous, fais le pour toi!
    -Je...
    -Fais le pour moi Don' !

    Je savais exactement ce qu'elle allait  faire. Et elle savait que je savais. Mais elle a quand même  continué. Et puis de toute façon le chef veillait.Elle a sortie  son flingue. Elle s'entraînait depuis des mois, ça se voyait. Elle l'a lentement braqué sur moi. J'ai pas bougé. Elle a dit:

-Désolé chérie, je préfère ce canon là! Je crois que pour toi, c'est bientôt fini.

Je l'ai regardée . Elle attendait  une réaction. Elle attendait  une réparti. J'avais un flingue vissé  sur mon front. J'étais sensé faire quoi? Qu'est ce qu'elle attendait de moi? Tout n'était pas sensé être écrit? Tout n'était pas prévu quelque part, dans un livre?

Le chef regardait. Il commençait  à  s'inquiéter.

Dolores, c'est pour toi que je suis là. Dolores, pour toi, c'est si facile. Dolores, ou es  tu pour me souffler ma réponse, cette riposte verbale qui me sauverait.

-Ne fais pas ça, je suis ton frère!

Merci Dolores. Je répète:

-Ne fais pas ça, je suis ton frère!

-Nan, ça va pas, tu aurais dû lui prendre la main quand tu disais ça!

-Ah ouais, c'est vrai, pardon Cédric, j'ai oublié.

-Bon, c'est pas grave, on est tous crevés, il se fait tard. Pour la semaine prochaine, apprend le rôle de Vincent dans tout le premier acte. Va  falloir qu'on se dépêche, c'est dans même pas 3 mois la représentation finale.
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Commenter cet article
L
la sortie de contexte c'est génial mais c'est pas un vrai piege que tu laisses de ficelles evidentes tout le long quand meme
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A
Tu nous fais croire qqchose, et puis sbam,"vous vous gourez bande de cons". Enfin, "tu te goures spèce de conne".
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V
Wa très beau texte ^^<br /> Bravo, le style, le thème, l'ambiance tout est superbe.
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A
Bonjour j aurais souhaiter rentrer en contact avec vous .je suis journaliste pour la télé .Je vous laisse mes coordonnées .Aurore 06 62 31 27 27
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